Les Vendanges de l'Autobus

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SOS Fantômes. (Le Spectre du Tendre).

Le jaune est, nous dit-on, couleur de l'inconstance.
Il est des fantômes de cette ressemblance:
Quand l'un vient à passer, jaune terne ou fripon,
Il est bien malaisé de n'y voir un jupon.

Tous les esprits n'ont pas cette couleur canaille.
Il en est qui flamboient d'un rouge de bataille.
Voyez donc celui-ci, d'un vrai rouge chantant,
Compagnon destiné de l'Or en Catalan.

Et puis, voyez ceci, d'un vert pâle et fragile,
Qui ne sait déployer son élan malhabile.
Le turquoise toujours peut virer au verdâtre
Et la saveur du jour un petit peu saumâtre.

Soudain, voilà passer un spectre frénétique,
Vivant, dansant, filant, d'un bleu presque électrique.
Il donne un coup de fouet rien qu'à le voir passer,
Vous laissant de côté comme un chiffon froissé.

Un fantôme orangé joue, passe et pirouette,
Facilement tourné, câline girouette,
Mais prêt à se donner quand volent alentour,
Comme des papillons, la tendresse et l'amour.

Ici, l'on voit passer une ombre de gala.
C'est sorti par ici mais revenu par là.
Tendre, mais si ténu qu'il n'est plus qu'une trace,
Un fantôme violet se dissout dans l'espace.

Il attire et repousse, et flotte à l'infini,
Eternel mouvement d'un Sysiphe puni,
Passant de l'un à l'autre en spectre survolté.
L'indigo, certes, n'est pas facile à porter.

A part de ces fumées flotte une ombre de sable,
Les regardant passer mais restant immuable.
C'est la toile de fond, le stable point d'ancrage.
Le noir est fulgurant, mais il n'est point volage.

Pâlissent ces couleur, et voici que s'avance
Comme un voile d'argent, flamboyante espérance,
Celle qu'on attendait, que l'on devait attendre,
Couronnement et fin de ce spectre du Tendre.
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© Vincent Herelle 2016